Existe-t-il des chenilles protégées en France ?

La réponse est oui ! Certaines espèces de Lépidoptères sont protégées dans notre pays, à l’échelle nationale ou régionale ; il est donc interdit de les détruire, au stade larvaire (chenilles) comme au stade adulte (papillons).

C’est l’Arrêté du 23 avril 2007 qui définit les espèces d’insectes qui sont protégées sur le territoire. Ces espèces sont regroupées dans deux listes différentes :

 → La première liste (article 2) définit les espèces dont les individus et les habitats sont protégés :
– « Sont interdits, sur tout le territoire métropolitain et en tout temps, la destruction ou l’enlèvement des œufs, des larves et des nymphes, la destruction, la mutilation, la capture ou l’enlèvement, la perturbation intentionnelle des animaux dans le milieu naturel.
Sont interdites, sur les parties du territoire métropolitain où l’espèce est présente ainsi que dans l’aire de déplacement naturel des noyaux de populations existants la destruction, l’altération ou la dégradation des sites de reproduction et des aires de repos des animaux.
Sont interdits, sur tout le territoire national et en tout temps, la détention, le transport, la naturalisation, le colportage, la mise en vente, la vente ou l’achat, l’utilisation commerciale ou non, des spécimens prélevés. »
Ces espèces bénéficient donc d’un niveau de protection très élevé.

La seconde liste (article 3) définit les espèces dont seuls les individus (et non les habitats) sont protégés :
« Sont interdits, sur tout le territoire métropolitain et en tout temps, la destruction ou l’enlèvement des œufs, des larves et des nymphes, la destruction, la mutilation, la capture ou l’enlèvement des animaux.
– Sont interdits, sur tout le territoire national et en tout temps, la détention, le transport, la naturalisation, le colportage, la mise en vente, la vente ou l’achat, l’utilisation, commerciale ou non, des spécimens prélevés. »

Article 2

Nymphalidés
Le Mélibée (Coenonympha hero)
Le Fadet des laîches (Coenonympha oedippus)
Le Moiré des Sudètes (Erebia sudetica)
Le Damier du frêne (Euphydryas maturna)
Le Nacré tyrrhénien (Fabriciana elisa) – présent en Corse uniquement
La Bacchante (Lopinga achine)

Lycaenidés
Le Cuivré de la bistorte (Lycaena helle)
L’Azuré du serpolet (Maculinea arion)
L’Azuré des paluds (Maculinea nausithous)
L’Azuré de la sanguisorbe (Maculinea telejus)
Le Cuivré des marais (Lycaena dispar)

Papilionidés
L’Alexanor (Papilio alexanor)
Le Porte-queue de Corse (Papilio hospiton) – présent en Corse uniquement
L’Apollon (Parnassius apollo)
Le Semi-apollon (Parnassius mnemosyne)
La Diane (Zerynthia polyxena)

La Laineuse du prunellier
La Laineuse du prunellier

Lasiocampidés
La Laineuse du prunellier (Eriogaster catax)

Sphingidés
Le Sphinx de l’argousier (Hyles hippophaes)
Le Sphinx de l’épilobe (Proserpinus proserpina)

Article 3

Nymphalidés
Le Nacré de la canneberge (Boloria aquilonaris)
Le Fadet des tourbières (Coenonympha tullia)
Le Damier de la succise (Euphydryas aurinia)
Le Damier des knauties (Euphydryas desfontainii)
Le Nacré de la bistorte (Proclossiana eunomia)
La Proserpine (Zerynthia rumina)

Lycaenidés
L’Azuré des mouillères (Maculinea alcon)

Papilionidés
Le Petit apollon (Parnassius phoebus)

Piéridés
Le Solitaire (Colias palaeno)
La Piéride de l’aethionème (Pieris ergane)

Érébidés
L’Écaille des marais (Diacrisia metelkana)
La Matrone ou Écaille brune (Pericallia matronula)
L’Écaille funèbre (Epatolmis luctifera)

Saturnidés
L’Isabelle (Graellsia isabellae)

Zygaenidés
La Zygène cendrée (Zygaena rhadamanthus)
La Zygène de la vésubie (Zygaena brizae)

Pourquoi les habitats de certaines espèces sont protégés ?

Chez certaines espèces de papillons protégés, la chenille a besoin de conditions particulières pour se développer, et seuls certains types d’espaces naturels sont capables de combler ces besoins. Prenons l’exemple de l’Azuré de la sanguisorbe : en France, sa chenille se nourrit exclusivement sur les Grandes pimprenelles (Sanguisorba officinalis), une plante appréciant les milieux plutôt humides. Ce petit papillon a donc besoin d’une zone humide pour se reproduire ; mais ce n’est pas tout ! L’Azuré de la sanguisorbe est une espèce myrmécophile, qui ne peut se développer sans la présence de fourmis : il faut donc également que, sur cette zone humide, soient présentes des fourmis du genre Myrmica (par exemple Myrmica scabrinodis ou M. rubra), qui « adopteront » la chenille et en prendront soin pendant plusieurs mois.
Il est donc essentiel pour cette espèce que les zones humides favorables à sa reproduction soient maintenues dans un bon état de conservation, sans quoi la protection de l’espèce seule n’aurait aucun sens.